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Traduction Gérard Merdjanian – commentaires
Même s'il y a une différence entre une reconnaissance officielle par un Etat et un vote de parlement, il n'en reste pas moins que la position de la Turquie devient de plus en plus inconfortable. Ankara se rend compte que son calcul n'est pas aussi efficace qu'il ne l'espérait.
Il devient de plus en plus clair que son désir de vouloir normaliser les relations avec l'Arménie avec la cérémonie en grande pompe du 10 Octobre dernier, n'était en fait qu'un coup de bluff poursuivant deux buts : - ralentir la reconnaissance du génocide arménien par la communauté internationale - et faire pression sur Erevan dans le conflit du Karabakh, tout en maintenant son blocus.
Le ministre turc des Affaires étrangères, Ahmed Davutoglu, ne vient-il pas d'annoncer que la ratification des protocoles arméno-turcs était ‘gelée' jusqu'au discours du président Obama le 24 Avril. Comme si la dite ratification suivait son cours depuis cinq mois qu'elle est dans les mains du parlement turc ! Alors qu'on sait très bien qu'Obama ne prononcera pas le mot ‘génocide' pour aider à la normalisation des relations arméno-turques ; mais cela fait gagner un mois et demi de plus.
Tout le monde ou presque a compris que les accords entre la Turquie et l'Arménie étaient moribonds. Au-delà d'un certain stade, l'acharnement thérapeutique ne veut plus dire grand-chose, sauf faire plaisir aux grandes puissances.
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Extraits de Reuters-Armenialiberty et de la Radio Publique d'Arménie
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La Turquie a rappelé ce jeudi son ambassadeur en Suède et a annulé le sommet à venir entre les deux pays après que le Parlement suédois ait qualifié de ‘génocide' les massacres des Arméniens par les forces ottomanes lors de la Première Guerre mondiale.
Cette décision intervient seulement une semaine après qu'Ankara ait rappelé son ambassadeur à Washington suite à l'approbation par la Commission des Affaires étrangères de la Chambre des Représentants d'une résolution similaire.
Le gouvernement turc a condamné la résolution, estimant qu'elle était "fondée sur des erreurs majeures et qu'elle ne reposait sur rien."
Membre de l'Union européenne, la Suède est l'un des plus fervents partisans de l'adhésion de la Turquie à l'UE, alors qu'Ankara, membre de l'OTAN, est considéré comme le plus fort allié de l'Ouest, des Etats-Unis.
"Nous condamnons fermement cette résolution, qui est faite pour des calculs politiques. Cela ne correspond pas à l'amitié entre nos deux nations. Nous rappelons notre ambassadeur pour consultations. Notre peuple et notre gouvernement rejettent cette décision basée sur des erreurs majeures et sans fondements," a déclaré le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, dans un communiqué, ajoutant qu'il avait annulé le sommet Turquie-Suède prévu au 17 Mars.
De son côté, le président turc Abdullah Gül a déclaré que la résolution sur le génocide arménien approuvée par le Parlement suédois n'a pas la moindre crédibilité. "Nous savons comment cette décision a été prise. Elle est inefficace de notre point de vue. Ceux qui ont pris cette décision et qui ont voté en faveur de la résolution ne sont pas des historiens," a-t-il déclaré.
La résolution suédoise a été adoptée d'une courte tête par les parlementaires, 131 voix pour - 130 contre, et 88 députés absents.
La coalition gouvernementale de Centre-droit était opposée à la résolution, mais trois de leurs membres ont voté en faveur de la motion, faisant ainsi basculer la balance.
Le ministre suédois des Affaires étrangères, Carl Bildt, a indiqué dans son blog que le vote pourrait compliquer les efforts entre la Turquie et l'Arménie qui essayent de normaliser les relations après un siècle d'hostilité. "La décision n'aidera pas non plus le débat en Turquie, qui est devenu d'autant plus ouvert et tolérant avec le rapprochement de l'Union européenne et suite aux réformes démocratiques", a-t-il déclaré.
Zergoun Korutürk, l'ambassadeur de Turquie en Suède, a déclaré lors de l'émission Aktuellt de la télévision suédoise que le vote aura des ‘conséquences dramatiques' sur les relations bilatérales qui ont peu de chances d'être surmontées rapidement. "Je suis très déçu. Malheureusement, les parlementaires ont pensé qu'ils étaient plutôt des historiens que des parlementaires, et c'est très, très malheureux."
Une source gouvernementale turque a déclaré toutefois à Reuters que Korutürk reviendrait probablement bientôt en Suède. "Nous savons que le gouvernement suédois a été très actif pour essayer d'arrêter cette résolution," a précisé la source.
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