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Traduction Gérard Merdjanian - commentaires
Ce n'est pas faute de l'avoir dit et répété : Bakou ne veut pas entendre parler d'une quelconque séparation du Haut-Karabakh de l'Azerbaïdjan et ce quelle que soient les pourparlers en cours et/ou les propositions du Groupe de Minsk.
Quant à l'utilisation de la force, cela dépend de l'humeur du sieur Aliev. L'entrevue de St Petersburg s'étant plutôt mal déroulée pour les Azéris, quoi de mieux que de lancer une action contre les lignes arméniennes. Résultat, quatre morts et quatre blessés côté Arméniens lors de l'attaque dans la nuit de vendredi d'un commando sur le village de Tchaïlou près de Mardakert.
De plus, cela a permis à Bakou de tester sur le terrain ses nouvelles armes et voir l'efficacité des multiples conseillers militaires turcs. Cela n'annonce rien de bon ; on n'ose imaginer, ou on imagine très bien, ce qui risque d'arriver si le groupe de Minsk venait à pencher côté Arménien.
Tomber dans le piège de la provocation serait sûrement le pire des scénarios.
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** Groupe de Minsk **
Les coprésidents du Groupe de Minsk de l'OSCE, ont publié aujourd'hui la déclaration suivante :
"Selon les rapports des ministères de la Défense de l'Arménie et l'Azerbaïdjan, un incident armé a eu lieu dans la nuit du 18-19 Juin 2010, dans la partie nord de la ligne de contact, faisant plusieurs victimes.
Les coprésidents du Groupe de Minsk de l'OSCE, les Ambassadeurs Igor Popov de la Russie, Bernard Fassier de la France, et Robert Bradtke des États-Unis condamnent fermement l'usage de la force et regrettent la perte insensée de vies. Un tel incident est une violation inacceptable de l'Accord de cessez-le feu de 1994 et est contraire à l'engagement déclaré des parties de s'abstenir de recourir à la force ou de menacer d'user de la force.
L'incident a eu lieu immédiatement après la réunion entre les Présidents de l'Arménie et l'Azerbaïdjan, qui s'est tenue à Saint-Pétersbourg le 17 Juin à l'invitation du Président de la Fédération de Russie à poursuivre les négociations pour un règlement pacifique du conflit du Haut-Karabakh. L'utilisation de la force militaire, en particulier en ce moment, ne peut qu'être considérée comme une manœuvre visant à dégrader le processus de paix.
Par conséquent, les coprésidents appellent les parties à faire preuve de retenue tant sur le terrain que dans leurs communications officielles, et préparer leur population pour la paix et non pour la guerre. Ils réaffirment qu'il n'y a pas d'alternative au conflit autre qu'une solution de négociations pacifiques et que la guerre n'est pas une option.
Enfin, ils appellent également les côtés à coopérer pleinement avec le Représentant personnel du Président de l'OSCE et ne rien faire qui nuirait à ses activités de surveillance."
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** Edouard Nalbandian **
Le ministre arménien des Affaires étrangères, Edouard Nalbandian, a donné une interview au magazine russe "Nezavissimaïa gazeta", il a notamment déclaré :
* Karabakh
"En ce qui concerne le problème du Haut-Karabakh, nous sommes reconnaissant à la Russie pour le rôle positif qu'elle joue dans les processus régionaux et en particulier dans le conflit du Karabakh. Le président russe Dmitri Medvedev fait de gros efforts pour aider les parties pour résoudre ce problème.
Il est impossible de décider quoi que ce soit sans la pleine participation du Haut-Karabakh dans le processus. C'est la population du Haut-Karabakh qui doit se prononcer sur le statut du Haut-Karabakh. Les coprésidents du Groupe de Minsk ont déclaré à plusieurs reprises l'importance de la participation du Karabakh dans les négociations. Tout accord sera insensé s'il n'est pas signé par le Haut-Karabakh."
* Turquie
"Nous sommes prêts à aller de l'avant lorsqu'Ankara sera de nouveau prêt à normaliser les relations sans conditions préalables. Les relations entre l'Arménie et la Turquie étaient dans l'impasse lorsque le président arménien Serge Sarkissian a lancé le processus de normalisation en Septembre 2008. Ensuite, les parties ont convenu de lancer le processus sans conditions préalables. Nous avons commencé le processus, on a eu des entretiens et avons atteint certains points sans conditions préalables. Par nature, les protocoles signés à Zurich ne contiennent pas de conditions préalables. L'utilisation d'un langage de conditions préalables par la Turquie et ses tentatives de vouloir lier la normalisation au règlement du conflit du Karabakh est une violation des accords conclus. Dans le même temps, la déclaration de la partie turque comme quoi la Turquie respecte les principes du ‘Pacta sund servanda' (Les conventions doivent être respectées) est pour le moins étrange. Ici de toute évidence, les actes ne correspondent pas aux paroles.
Non seulement Erevan, mais aussi Moscou, Bruxelles, Washington et Paris ont à plusieurs reprises indiqué qu'il ne peut y avoir de lien entre le conflit du Karabakh et les relations arméno-turques et que de telles tentatives ne peuvent que nuire à ces deux processus.
Q : Ankara se sert-il de projets économiques intéressants pour que Moscou fasse pression sur Erevan concernant le conflit du Karabakh ou la reconnaissance internationale du génocide des Arméniens ?
R : L'Arménie et la Russie n'ont jamais été dans des côtés opposés d'une barricade, elles ont toujours lutté contre des ennemis communs. Notre amitié a passé l'épreuve du temps. La reconnaissance internationale du génocide des Arméniens est une question qui concerne non seulement la nation arménienne, mais toute l'humanité. La reconnaissance du premier génocide du 20e siècle est une garantie pour la prévention de crimes similaires dans le futur."
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** Gagik Minassian **
"Le président azerbaidjanais Ilham Aliev n'attendait rien de positif de la réunion de Saint-Pétersbourg. Il ne peut pas être satisfait du processus de règlement du conflit du Karabakh. Le processus actuel est la seule option correcte pour résoudre le problème," a déclaré le député républicain Gagik Minassian, lors d'une conférence de presse. Selon lui, la communauté internationale, en général, et les pays membres de l'UE en particulier, devraient clarifier leur position sur l'Azerbaïdjan, sinon les conséquences seront très déplorables.
Le député a présenté ses condoléances aux parents des quatre soldats tués à la suite de l'accrochage sur la ligne de contact.
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** Arthur Bagdassarian **
Le Secrétaire à la Sécurité nationale d'Arménie, Arthur Bagdassarian, a reçu le Représentant spécial de l'UE pour le Sud-Caucase, Peter Semneby. Les questions liées au plan d'action UE-Arménie pour la période 2009-2011 ont été discutées lors de la réunion. "Cette année, l'Arménie sera plus active dans la mise en œuvre des réformes et des mesures envisagées par la politique européenne de voisinage," a-t-il indiqué au Représentant de l'UE.
Le règlement du conflit du Karabakh a été abordé, et particulièrement la récente provocation de l'Azerbaïdjan. Le Secrétaire a indiqué que "la communauté internationale doit condamner de tels actes, ainsi que les déclarations belliqueuses de l'Azerbaïdjan, pour éviter leur réapparition dans le futur."
Peter Semneby a exprimé sa préoccupation concernant l'incident et a indiqué que la communauté internationale devrait accorder une plus grande attention à cet incident.
Se référant à la Résolution 2216 adoptée par la Commission européenne, Arthur Bagdassarian a indiqué que : "ces résolutions unilatérales qui sont basées sur des informations incomplètes portent ombrage au processus de négociation sur le règlement pacifique du conflit du Haut-Karabakh."
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** Sergueï Minassian **
"La réunion des Présidents à Saint-Pétersbourg et l'incident sur la ligne de contact entre le Haut-Karabakh et l'Azerbaïdjan sont étroitement liés," a déclaré le directeur adjoint de l'Institut du Caucase, le politologue Sergueï Minassian, lors d'une conférence de presse.
Selon le politologue, la réaction d'Aliev et d'autres développements sont la preuve que les pourparlers ont été négatifs pour l'Azerbaïdjan. "La réunion de Saint-Pétersbourg a mis un terme aux revendications de la Turquie concernant le conflit du Karabakh."
"Le résultat le plus marquant de la réunion a été que le processus de négociation est revenu à la situation d'il y a six mois. Le fait qu'Aliev soit immédiatement retourné à Bakou signifie que la conversation a été désagréable pour lui. Elle a été suivie par une provocation de Bakou, qui démontre que l'Azerbaïdjan n'abandonnera pas les tentatives de résoudre le problème par la force."
Pour le directeur adjoint, la Russie devrait sérieusement être préoccupée par les événements sur la ligne de contact, d'autant plus que l'influence de Moscou sur les pays postsoviétiques augmente progressivement. Le politologue estime que la Russie et le Groupe Minsk devrait faire une déclaration ad hoc.
"Il est clair qu'après ces événements, les pourparlers ne peut pas continuer sur la base de la soi-disant ‘mise à jour' des principes de Madrid. Si le processus de négociation reprend, il continuera sur la base des principes classiques de Madrid," a souligné Sergueï Minassian.
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Extrait de la Radio Publique d'Arménie