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Traduction Gérard Merdjanian - commentaires
Eternelle Turquie.
Comme le dit très clairement le chantre du néo-ottomanisme, le ministre des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, Ankara n'a que faire de l'Arménie et des Arméniens, d'autant que la diaspora arménienne est en fait des ex-citoyens turcs exilés !
Que le frontière arméno-turque soit totalement hermétique depuis 17 ans après avoir été quasi-verrouillée pendant 75 ans ; - qu'Ankara ne dispose pas d'une ambassade à Erevan, et vis et versa ; - que toutes les voies de transit (marchandises et/ou hydrocarbures) contournent l'Arménie, ne gênent nullement la quinzième puissance économique mondiale.
Une seule chose la dérange vraiment dans ses rêves de grandeur : Devoir reconnaître le génocide des Arméniens et réparer. Cela fait désordre pour celui qui vise à devenir le leader régional.
Aussi tout est mis en œuvre pour contrer, voire devancer le travail des organisations arméniennes qui se battent pour faire reconnaître le génocide, et le cas échéant faire pénaliser sa négation. L'important c'est de donner le change aux yeux de la communauté étrangère et montrer sa bonne volonté. Et si cela s'avère insuffisant, alors d'autres moyens sont mis en œuvre : financement de groupuscules extrémistes, de pseudo-chercheurs anti-arméniens, et bien sûr user de menaces politiques et/ou économiques.
Plus on va approcher de la commémoration du centenaire, et plus ces manœuvres de diversions vont s'amplifier.
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* Du processus de normalisation
Lors de la Conférence intitulée "politique de la Turquie sur l'engagement dans le monde contemporain" organisée par le Centre d'analyses anglais Wilton Park à Istanbul, Davutoglu a déclaré au journaliste arménien Hagop Avédikian (AZG) :
"Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre l'Azerbaïdjan pour des raisons de relations avec l'Arménie. Nous avons demandé à plusieurs reprises tant au président arménien, qu'à mon homologue Edouard Nalbandian, de restituer à Bakou un ou deux districts occupés, par exemple Fizuli ou Aghdam, comme un geste pour sauver la face à l'Azerbaïdjan. Au quel cas, l'Azerbaïdjan était également prêt à ouvrir sa frontière. Mais l'Arménie a refusé."
Le ministre turc a déclaré que les pourparlers entre l'Arménie et la Turquie avaient débuté en 2005, lorsque la Turquie a mis en œuvre sa politique de "zéro problème avec ses voisins", élaboré par Davutoglu et qui a dirigé les pourparlers avec l'Arménie avant de devenir ministre des Affaires étrangères.
"Nos discussions avec la partie arménienne poursuivent trois objectifs : - ouvrir la frontière, - établir des relations diplomatiques, - et établir des relations directes et indirectes entre nos deux pays."
Le ministre a précisé : "le troisième point englobe l'établissement de relations avec les Arméniens de la diaspora, que nous considérons comme notre diaspora, vu qu'ils ont immigré de la Turquie vers l'Amérique, la France et ailleurs dans le monde. C'est pourquoi, nous avons récemment eu une réunion ici avec l'archevêque Khajag Barsamian (primat de la côte Est des Etats-Unis)."
Il a également ajouté que, pour l'Arménie, les protocoles visaient à ouvrir la frontière et à établir des relations diplomatiques, tandis que pour la Turquie le processus ciblait la ‘conciliation' des problèmes historiques. Davutoglu a affirmé que les deux côtés, turcs et arméniens, avaient discuté de cette question et étaient parvenus à une certaine compréhension avant de signer les documents en Octobre 2009.
* Un Arménien comme représentant de la Turquie ?
Lors de cette manifestation du 26 Mars, Davutoglu a indiqué aux participants à la conférence : "Notre concitoyen d'origine arménienne, Daron Acemoglu, sera nommé ambassadeur de Turquie à Paris". Proposition qu'avait toujours rejetée Acemoglu.
Économiste bien connu d'Istanbul, Daron Acemoglu n'est pas seulement un citoyen turc, mais aussi des États-Unis, c'est-à-dire ayant une double nationalité. Par ‘ambassadeur à Paris' il aurait en fait représenté la Turquie au sein de l'Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE) à Paris. Donc rien à voir avec le poste d'ambassadeur de la Turquie en France.
Voici ce que le quotidien turc Hurriyet écrivait : "(…) Acemoglu est un savant respecté. Il mérite des positions beaucoup plus importantes. Cependant, je suis préoccupé par un autre facteur, que la proposition faite à Acemoglu a été présentée comme ‘une faveur et généreuse' dans le journal. En fait, ce n'est pas la proposition qui doit être évaluée comme une faveur et généreuse, mais l'acceptation du poste proposé. Comme on le voit, le chauvinisme reste encré dans les cellules de notre société. Pendant ce temps, les Juifs, les Arméniens, les Grecs, qui sont citoyens de notre pays, paient des impôts, font leur service militaire, et votent comme nous le faisons. Mais quand il s'agit d'une nomination au poste important, nous nous souvenons d'eux que quand ils atteignent une renommée mondiale. Nous avons confisqué leurs biens communautaires. Les lois que nous avons adoptées ne peuvent compenser cela. J'espère que cette proposition faite au professeur Acemoglu sera un signe pour secouer le reproche qui a causé ce genre de discrimination et de racisme."
Et le journal ‘Yeni Asia' d'ajouter : "Acemoglu originaire d'Istanbul, est l'un des 10 économistes de premier plan dans le monde et un éminent spécialiste. Bien qu'il n'ait pas encore accepté la proposition, cependant, il est possible qu'il le fasse après avoir reçu le prix Nobel. La nomination d'un scientifique comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire, même à l'OCDE, surtout dans un pays comme la France, qui soutient délibérément les thèses arméniennes du génocide, serait extrêmement utile pour de nombreux aspects."
A noter que ‘Yeni Asia' par opposition à ‘Hurriyet', est proche des nationalistes turcs. La question ne porte donc pas sur les nationalistes, mais sur les inclinations turques à spéculer sur une offre faite Acemoglu et les attentes en cas de nomination.
D'après le quotidien turc Radikal, le professeur Daron Acemoglu du Massachusetts Institute of Technology (MIT), a décliné l'offre qui lui a été faite.
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* Mise au point sur les relations arméno-azéries
Le Vice-ministre arménien des Affaires étrangères, Chavarche Kotcharian, a déclaré que l'Azerbaïdjan doit afficher une attitude constructive, de sorte qu'il y ait des chances pour un règlement du conflit du Karabakh.
Selon lui, le progrès est conditionné par la disponibilité des parties à un dialogue constructif. L'Arménie et le Karabakh ont fait tout leur possible pour une progression fondée sur des compromis, maintenant la balle est dans le camp adverse.
"Un exemple de compromis. Il aurait été juste, de demander à l'Azerbaïdjan qu'il rendre avant les négociations les territoires du Haut-Karabakh occupés, ce qui n'a pas été fait. Le retour de ces territoires aurait signifié le rejet des tentatives de résoudre le problème par la force. Par ailleurs, il n'y a pas eu de demande de reconnaître l'indépendance de la RHK. Pour sauver la face des autorités azerbaïdjanaises, les médiateurs ont proposé un soi-disant ‘référendum éloigné', dont les résultats sont contraignants pour toutes les parties."
"De plus, l'Azerbaïdjan menace en permanence d'utiliser la force, ce que finit par ne plus avoir d'effet sur le côté arménien. Bakou interprète le principe du droit à l'autodétermination de façon très particulière, ne voit l'avenir du Karabakh qu'au sein de l'Azerbaïdjan et ne parle que d'intégrité territoriale dans sa vision. En complément, Bakou tente constamment de discréditer le Groupe de Minsk et de transférer le problème à d'autres institutions," a déclaré Kotcharian.
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Extrait de PanArmenian et de AZG