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Traduction Gérard Merdjanian -commentaires
On se souvient que le
processus "Une nation, deux Etats" a été initié par le
père du président actuel, Haydar Aliev. Le thème repris en Août 2010 par
le président Abdullah Gül : "Nous sommes une seule et même nation.
Nous sommes les deux pays différents de cette nation unique. L’amitié, la
fraternité et la solidarité entre la Turquie et l’Azerbaïdjan ne se limitent pas
aux mots et aux déclarations." Puis par le premier ministre Erdogan :
"La
Turquie et l'Azerbaïdjan sont deux frères inséparables et nous sommes des
membres de la famille."
Le grand frère ottoman
avait donné l’exemple il y a un siècle sur l’art et la manière de traiter la (ou
les) minorité du pays quand celle(s)-ci ne se conforme(nt) pas aux us et coutumes
de la majorité. De plus, lorsque la dite minorité n’est de la même religion que
celle de l’Etat, celui conduit à des excès de la part des militaires et à des exactions
de la part des civils. Autre spécificité du grand frère : nier les faits avérés
et accuser l’autre d’avoir les mêmes méfaits envers sa population. Ainsi les
Arméniens auraient massacrés le même nombre de Turcs, qui varie d’une année sur
l’autre, et pour certains, auraient même perpétré un génocide turc.
Le petit frère azéri n’avait
plus qu’à suivre l’exemple. Quand les Arméniens du Haut-Karabakh ont demandé en
1988 le rattachement de la région à l’Arménie conformément aux lois soviétiques
en vigueur, Bakou a envoyé ses troupes contre ladite région et la population azerbaidjanaise
s’est occupée de l’organisation des pogroms dans les communautés arméniennes
disséminées sur le territoire de l’Azerbaïdjan. Quelques années plus tard, de dépit le président Aliev ordonne la destruction (filmée) des milliers de pierre-croix (Khatchkars) du cimetière médiéval de Djougha au Nakhitchevan. Et cerise sur le gâteau, pour
masquer les dissensions entre factions internes, les milices azéries n’ont pas
hésité à tirer sur leur population en fuite, et jeter la faute sur les soldats
arméniens, en les accusant d’avoir perpétré un génocide à Khodjalou.
Si le petit frère
égale son ainé dans l’horreur, fort heureusement il ne l’égalera jamais en
nombre de victimes.
"Le pire de certaines haines, c'est
qu'elles sont si viles et rampantes qu'il faut se baisser pour les combattre."
(Marie d'Agoult)
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Thomas de Waal, analyste
senior du ‘Carnegie Endowment for International Peace’, a écrit un article analytique
intitulé «Le dilemme azerbaïdjanais» sur le site web Intérêt national.
Où va l'Azerbaïdjan ? Ce pays du Caucase vient de rejoindre
le Conseil de sécurité des Nations Unies, il est riche comme jamais auparavant,
les caisses de l'Etat regorgent des recettes pétrolières et gazières. Mais sa
position dans le monde est à peine plus visible qu'elle ne l'était il y a vingt
ans.
Ses relations avec les pays occidentaux sont décrites comme
transactionnelles, dépendantes de ses approvisionnements énergétiques et de la
position du pays en tant que passage vers l'Afghanistan. Les Azerbaïdjanais sont
mécontents des difficiles relations avec Washington dues au lobby arménien du
Congrès qui a bloqué la confirmation de Matt Bryza comme ambassadeur des
États-Unis, laissant le Département d'Etat sans représentant à Bakou. Les
responsables américains disent que les relations ne sont pas mauvaises, mais qu’elles
ne s’amélioreront pas tant que l'Azerbaïdjan sera loin d'être une démocratie.
L'Azerbaïdjan entretient des relations difficiles avec tous
ses voisins. Ainsi, on a le conflit gelé avec l'Arménie, les tensions latentes
avec l'Iran et le Turkménistan, la suspicion d’un masquage de l’amitié
perpétuelle avec la Russie et les malentendus constants avec les prétendument
proches cousins turcs.
Même les relations avec le voisin le plus proche, la
Géorgie, ne sont pas sans problèmes. Le président géorgien Mikhaïl Saakachvili
a parlé de l'amitié Azerbaïdjan-Géorgie lors d'une visite à Bakou début Mars et
a même proposé que les deux pays fassent une offre conjointe pour accueillir le
championnat d'Europe de football 2016. Mais Saakachvili a causé un malaise lors
de son discours (en langue russe) devant le Parlement azerbaïdjanais, quand il
a abordé la politique étrangère de Moscou, déclarant : "Cette politique a beaucoup de noms,
mais un seul sens pour nous tous les voisins de la Fédération de Russie : la
fin de notre liberté et de notre indépendance, la fin du rêve de Rasulzade et de
beaucoup d’autres de nos ancêtres."
Le discours a soulevé le courroux de certains parlementaires
azerbaïdjanais. Ils ont avancé que le président géorgien avait offensé le
protocole en utilisant leur parlement pour attaquer un Etat voisin avec lequel
ils essaient de maintenir de bonnes relations. Les nombreuses références de
Saakachvili à Ahmad Amin Rasulzade, dont la célèbre phrase "Le pavillon, une fois levée, ne baissera
jamais" a été utilisée pour conclure son discours, sont aussi mal passées.
Rasulzade est une figure historique que l’élite gouvernementale actuelle
préfère ne pas glorifier en public. Il a été le fondateur de la première
république d'Azerbaïdjan indépendant en 1918 et le chef du Parti Musavat,
maintenant principal parti d'opposition.
Israël est un autre allié avec lequel les relations sont
excellentes. Les deux pays disposent d'un solide partenariat commercial et
politique, avec une politique étrangère orientée pro-occidentale et une
résistance déclarée à l'islam radical. Etre le meilleur ami d'Israël dans cette
région a un coût. Pas de chance pour Bakou, les médias israéliens ont récemment
révélé un accord sur des ventes d’armes d’une valeur de 1,6 milliards de
dollars entre Israël et l'Azerbaïdjan. Cette révélation a provoqué des
frictions avec l'ambassadeur turc à Bakou, qui s’était déjà plaint l'an dernier
que les Azerbaïdjanais se devaient de soutenir Ankara dans son différend avec
Israël, tout comme la Turquie soutenait l'Azerbaïdjan dans son conflit avec
l'Arménie sur le Haut-Karabakh. Et, bien sûr, cela attire l'attention hostile
de l'Iran.
L'Azerbaïdjan a rejoint le Conseil de sécurité en Janvier.
C'est à la fois une marque de respect et une grande responsabilité. Comme un
diplomate occidental de Bakou me l'a dit, "Vous
pouvez vous cacher à l'Assemblée Générale des Nations Unies, vous ne pouvez pas
vous cacher au Conseil de sécurité." Les Azerbaïdjanais sont
maintenant tenus de prendre position sur des questions telles que la Syrie, où
ils auraient préféré garder le silence comme avant.
Comme la Turquie qui a trouvé un très grand auditoire, car il
est plus facile de déclarer de grandes ambitions de politique étrangère que de
les réaliser. La capacité est limitée. Il y a beaucoup de gens dans le nouvel
Azerbaïdjan qui sont bons pour faire de l'argent ou du négoce, mais très peu
sont aptes à porter le fardeau de la politique étrangère et à mener un travail coordonné.
En même temps, le gouvernement de Bakou riche, de son
pétrole, est de plus en plus opaque. Les visiteurs étrangers et les diplomates
se plaignent qu'il leur est de plus en plus difficile d'accéder aux décideurs et
ont du mal à comprendre la stratégie du gouvernement. C'est le contexte dans
lequel l'Azerbaïdjan doit faire face à ce qui pourrait être son plus grand test
de la politique étrangère depuis la guerre avec les Arméniens, qui s'est
terminée en 1994 : comment gérer la crise imminente avec l'Iran, un proche
voisin, un Etat chiite et un adversaire idéologique fort.
La présomption de l’action a toujours été : que parce que
les deux pays ont la capacité de se faire du mal les uns les autres, ils
s'abstiennent de faire quoi que ce soit qui les entraîne dans une confrontation
à grande échelle. L'Iran a une influence sur des dizaines de mosquées et des
dizaines de milliers d'islamistes en Azerbaïdjan qui pourraient ébranler l'Etat
azéri. Il fournit également une aide économique vitale et de l'énergie à
l'enclave du Nakhitchevan. De même, l'Azerbaïdjan a la capacité de remuer
l’importante minorité azérie s’il le voulait.
Ce scénario est actuellement testé. En Janvier, le
gouvernement azerbaïdjanais a déclaré que ses sites Internet avaient été
attaqués et défigurés avec des messages anti-israéliens, puis il a annoncé
qu'il avait déjoué un complot iranien en vue d'assassiner un enseignant juif et
un rabbin à Bakou. Un parlementaire azerbaïdjanaise a saisi l'occasion pour enfoncer
le clou en lançant l’idée que son pays devrait être rebaptisé ‘Azerbaïdjan du
Nord’ - ce qui implique que les provinces septentrionales de l'Iran devraient
s’appeler ‘Azerbaïdjan du Sud.’
Fort heureusement, la situation s’est calmée. Les autorités
azerbaïdjanaises à qui j'ai parlé sont concentrés sur la gestion du pays. Mais
si les problèmes se dégradent, l'Azerbaïdjan aura besoin de garder son
sang-froid et - une situation fâcheuse plus arrivée depuis un certain temps - trouver
un moyen de demander de l'aide.
* Brève APCE *
Une délégation de trois membres de l'Assemblée parlementaire
du Conseil de l'Europe (APCE), conduite par la baronne Emma Nicholson (Royaume-Uni - ADLE), effectuera une mission
pré-électorale aux fins d'évaluer le cadre et la campagne électorale, à Erevan
les 11-12 Avril, en vue des élections parlementaires en Arménie du 6 mai prochain,.
La délégation doit rencontrer le Président Serge Sarkissian,
le Président de l'Assemblée nationale, Samuel Nikoian, le ministre des Affaires
étrangères, Edouard Nalbandian, ainsi que les dirigeants des partis politiques
en lice pour les élections.
Des discussions sont également prévues avec la délégation
arménienne à l'APCE, le président de la Commission électorale centrale Tigrane Mukuchian,
des représentants du corps diplomatique et de la société civile, ainsi que les
médias.
Cette délégation sera suivie par une autre composée de 28
personnes de l'APCE qui observeront le scrutin avant d’en faire une évaluation
finale.
* Brève Russie*
"Les
parlements arménien, russe et azerbaïdjanais peuvent contribuer au règlement du
conflit du Haut Karabakh. Nous devons nous concentrer sur l'établissement de
contacts, l’organisation de rencontres entre intellectuels et personnalités
culturelles des trois pays. Notre objectif est de créer un climat de confiance.
Il sera difficile de trouver une solution pratique au problème sans un
renforcement de la confiance," a déclaré à Bakou le 9 Avril la présidente
du Conseil fédéral de la Russie, Valentina
Matvienko.
"En tant que
pays co-président du Groupe de Minsk de l'OSCE, la Russie fait tous les efforts
nécessaires pour trouver une solution au problème. Ce problème n'a pas de
solution rapide. Il n'est pas facile, mais très difficile. Toutefois, nous
agissons dans le strict respect des résolutions de l'ONU sur le sujet. Nous
suivons la loi internationale."
La présidente a rappelé que plusieurs réunions tripartites
ont eu lieu entre l'Azerbaïdjan, l'Arménie et les dirigeants russes à
l'initiative du président Medvedev.
"Le potentiel
du groupe Minsk de l'OSCE n'est pas été épuisé. Les médiateurs doivent poursuivre
ce travail. La Russie a joué et continuera de jouer un rôle actif en tant que coprésident
pour trouver une solution mutuellement acceptable. La bonne volonté des deux
côtés et la recherche d'une solution pacifique sont nécessaires," a-t-elle
ajouté.
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* Communiqué du ministère
des Affaires étrangères de la RHK
"Dans
l'histoire du conflit Azerbaïdjan-Karabakh, qui abonde de nombreux faits d'atrocités
et d’actes de vandalisme commis par l'Azerbaïdjan, les événements du village de
Maragha (région de Mardakert) sont une des manifestations les plus extrêmes de
sadisme et de barbarie.
Le 10 Avril 1992,
après un bombardement préalable de trois heures, les sous-unités de l'armée
régulière azerbaïdjanaise, en provenance du village azerbaïdjanais de
Mir-Bashir (maintenant Tartar), ont envahi le village du Haut-Karabakh, Maragha.
Une centaine de personnes a été tuée - principalement des femmes, des enfants
et des personnes âgées. Des dizaines de personnes ont été prises en otage pour être
échangées plus tard, mais le sort de beaucoup d'entre eux reste encore inconnu.
Deux semaines plus tard, les 22-23 Avril, le village a de nouveau été attaqué à
plusieurs reprises et les quelques personnes qui restaient, ont été contraintes
d'abandonner le village une fois pour toutes.
Les crimes
monstrueux dans Maragha ont été suivis par les pogroms arméniens et les
déportations dans le Nord de l’Artsakh, à Bakou, Soumgaït, Kirovabad et
d'autres communautés arméniennes de l'Azerbaïdjan, le but recherché étant d’effrayer
les gens et les inciter à retourner chez eux [l’Arménie]. Avec la profondeur de
la tragédie humaine, le niveau de cruauté, le nombre de personnes violentées et
capturées, les événements de Maragha occupent une place particulière parmi les
crimes sanglants azerbaïdjanais commis à Getashen, Martounashen, Buzlukh, Erkej
et d'autres villages arméniens dans la partie nord de l’Artsakh en 1991-1992.
La Vice-présidente de
la Chambre des Lords du Parlement britannique, la baronne Caroline Cox, qui a visité le lieu de la tragédie
quelques jours plus tard, a été choquée par ce qu'elle a vu. "Ils
ne sont pas humains," a-t-elle
déclarée constatant le massacre perpétré par les militaires azerbaïdjanais. La
baronne Caroline Cox a pris des photos et des vidéos des atrocités commises dans
le village de Maragha. Par la suite, elle les a publiées dans son livre ‘Ethnic
Cleansing in Progress’, et en a parlé lors de ses nombreuses interviews.
"Il est
impossible de décrire ce que nous avons vu là-bas. Le village a été
complètement détruit. Les gens enterraient les morts, en fait ils enterraient
des restes humains carbonisés, torturés, démembrés et des corps disloqués. Nous
avons vu les épées sanglantes par lesquelles toutes ces brutalités avaient été commises.
Après avoir tué les villageois, les Azéris ont pillé puis incendié le village.
Soit dit en passant, on nous a dit que les militaires étaient suivis par des
civils portant des troncs pour terminer le pillage, - et nous avons vu certains
de ces troncs dispersés sur le sol, que les pillards n'ont pas réussi à
emporter avec eux," raconte
Mme Caroline Cox.
En 1997, un certain
nombre d'organisations des droits de l’homme ont conjointement préparé un dossier
complet sur les événements de Maragha et l'ont soumis à la Commission des
Nations Unies sur les droits de l'homme. L’Organisation ‘Helsinki Watch
International Human Rights’ a officiellement confirmé que des dizaines de
civils avaient été martyrisés, et des dizaines de femmes et d'enfants pris en
otage. Cependant, les médias internationaux n’ont pas couvert le massacre des
Arméniens à Maragha, et la communauté internationale n'a toujours pas encore
donné une quelconque suite à ces événements tragiques.
"Vous
avez l'arme la plus puissante : la vérité. Vous devriez la porter à la
connaissance des structures internationales et montrer que l'Azerbaïdjan a
tenté de commettre un génocide contre la population du Karabakh. Vous devez
présenter plus activement au monde les crimes de masse perpétrés contre les
Arméniens à Maragha, Soumgaït, Bakou, etc. Ce sont des crimes contre
l'humanité. Je soutiens les Arméniens et
comprends qu'ils ne seront jamais capables de vivre sous la domination de l'Azerbaïdjan.
Les Arméniens du Karabakh, qui ont vécu sous le contrôle de l'Azerbaïdjan, ont
beaucoup souffert," a précisé
la baronne Cox.
Le massacre de
Maragha, qui est toujours sous occupation azerbaïdjanaise, ne peut pas être
appelé ‘opération militaire’, car il n'y avait aucune base militaire dans le
village mais seulement des citoyens pacifiques, qui sont devenus la principale
cible de l'agression. Ces crimes visaient à expulser la population arménienne
de sa patrie. Le massacre de la population civile désarmée de Maragha est un
crime contre l'humanité et la civilisation, sans délai de prescription, et les
auteurs de ce crime doivent subir la peine dans toute la rigueur de la loi,"
indique le communiqué
du ministère.
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Extrait de Times, de
Radiolour et de PanArmenian