Traduction de Gérard Merdjanian
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Libre opinion
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La construction d'un mur entre
les Etats en conflit est devenue, pour ainsi dire, à la mode au cours des
dernières années. Israël a construit un mur à la frontière avec les territoires
palestiniens, les Grecs chypriotes sont en train de s’isoler de Chypre-Nord et
les Etats-Unis se protègent du Mexique. Bakou a décidé de rejoindre la
«tendance» en construisant un mur entre le Haut-Karabakh et l'Azerbaïdjan.
La construction d’un mur de 3
mètres de haut a été lancée en
2011 et vise principalement à protéger les
villages situés en première ligne. Les médias azerbaïdjanais ont déjà surnommé
le projet "La Grande Muraille du Karabakh", à défaut toutefois, de
fournir une explication rationnelle de son but. L'Agence azerbaïdjanaise pour
la Réhabilitation et la Reconstruction des Zones a pris l'initiative, avec un
coût estimé à 300 millions d’€. Le gros des fonds alloués seront probablement
empochés ; soit, mais quel est le but de ce mur ? Selon les observateurs
azerbaïdjanais, la construction de cet ouvrage est en contradiction avec les
déclarations du gouvernement azéri qui invite à la «libération» du Karabakh. Il
affirme également que les politiciens et les médias arméniens présentent le
projet de construction comme la réconciliation de l'Azerbaïdjan avec la perte
du Karabakh. C’est vrai qu’une opinion différente aurait semblé étrange en
Arménie. Cependant, Ilham Aliev a besoin de construire ce mur, à la fois pour
l'affirmation de soi et pour démontrer son souci envers son peuple, à savoir la
population des régions frontalières "souffrant" des fusillades
[arméniennes]. Une telle logique implique qu'un mur construit par l'Arménie aurait
semblé plus rationnel, vu que les tireurs d'élite abattent les Arméniens, et
non les Azerbaïdjanais. Pourtant, un mur est nécessaire pour des raisons de
sécurité, de plus, il est nécessaire pour prévenir les cas de désertion. En un
mot, cela va être une sorte de Grande Muraille de Chine-Berlin réunis.
En fait, Aliev est atteint de la mégalomanie.
il a construit un immense palais - Fondation Haydar Aliev, qui a brûlé quelques
temps après, puis il construit une tour pour rivaliser avec celle de Dubaï - BurjDubaï,
sans oublier le drapeau géant qui est tombé et s’est déchiré tant de fois que
même les médias de Bakou ont cessé d’en parler. Ajoutons à tout cela les nombreux
monuments dédiés à son père Haydar Aliev à travers le monde, et maintenant le
mur ...
Eh bien, si nous prenons
l'affaire un peu plus au sérieux, la construction de la barrière, c'est d'abord
une installation de fortification qui peut accueillir des niches pour snipers,
des radars et beaucoup d'autres matériels pour suivre l'ennemi, y compris des
pièces de défense aérienne. Bien que difficilement réalisable, mais quand même,
qui sait ? Pas étonnant que l'information sur la construction du mur ait été
diffusée au même moment que l’inauguration de l'aéroport de Stepanakert.
Que le mur soit construit ou non,
l'Azerbaïdjan se préparera aux élections présidentielles de l'automne, avec un Ilham
Aliev donné gagnant. L'information diffusée sur ce projet est une action bien
pensée pour le lancement de la campagne électorale. Aliev gagnera les élections,
mais il a besoin de montrer à l'Occident que le résultat des élections -
environ 70-75% des suffrages, est réaliste, et donc acceptable. De plus, les
mouvements impopulaires aideront Ilham Aliev, ils ne peuvent le déstabiliser
mais plutôt l’aider compte tenu de l’enjeu. S’il devait d’un coup partager le
sort de Mikhaïl Saakachvili, il aurait des difficultés à maitriser la
situation, car si la Géorgie est un "phare de la démocratie" pour
l'Occident, et ce n'est pas du tout le cas avec Aliev. Entre temps, le mur sera
vite oublié car personne hormis le leader azéri n’en a vraiment besoin.
Karine Ter-Sahakian – PanArmenian – Département Analyse