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Commentaires et Traductions de Gérard Merdjanian
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Commentaires
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Le
10 Août 1920 le traité de Sèvres était signé entre l’empire ottoman et les
Alliés victorieux. Trois ans plus tard, le 24 juillet 1923, les mêmes acteurs
signaient le traité de Lausanne. Trois années très riches en rebondissements. Trois
années qui ont servi essentiellement à détricoter tout ce que le traité de
Sèvres devait apporter aux minorités.
Un
grand gagnant : la Turquie. Deux grands perdants : Les Arméniens et
les Grecs. Quant aux Alliés, ce sont la France et la Grande-Bretagne qui
se sont partagées les restes moyens-orientaux de l’empire ottoman, alors que leur
côté, les Bolcheviques installaient manu militari le régime soviétique sur les
restes de l’empire tsariste et notamment sur les républiques démocratiques
transcaucasiennes.
Mustafa
Kemal (Atatürk), chef du mouvement national turc, refuse de ratifier le traité
de Sèvres à l’instar des gouvernements français et britannique, exception faite
de la Grèce. Déjà dès l’automne 1920, Georges Leygues, alors président du
Conseil des ministres de la France, déclarait que, la France ne ratifierait pas
ce traité et, qu’il faut le réviser.
Arrive
1921, une année riche en péripéties, ‘horribilis’ pour certains, profitable
pour d’autres.
Mustafa
Kemal bénéficie de l'appui de la France qui, en mars (1) signe un accord avec le gouvernement kémaliste, puis un traité
de paix en octobre de la même année(2).
Parallèlement et aux mêmes mois, les Bolcheviques signent avec les Kémalistes
le traité de Moscou(3) en mars puis le
traité de Kars(4) en octobre, et
rendent à la Turquie le territoire de Kars (attribué à l'Empire russe par le
traité de San Stefano en 1878). Les autochtones sont expulsés et remplacés par
des Turcs et des Kurdes.
De
même que les forces de l’Entente ont caressé Mustafa Kemal dans le sens du poil
et lui ont octroyé la Turquie actuelle au traité de Lausanne en juillet 1923,
un siècle après, les Occidentaux poursuivent la même politique complaisante.
Les Américains à travers l’OTAN, renient leurs propres valeurs
(non-reconnaissance du génocide des Arméniens). Les Européens à travers les
négociations d’adhésion à l’Union européenne, toujours ouvertes, réprimandent
du bout des lèvres les «violations» quasi-permanentes des gouvernements
turcs - occupation militaire de 37% de Chypre, invasion partielle de la
Syrie, chantage aux migrants, piétinement des libertés, livraisons d’armes à la
Lybie, fouilles dans les eaux territoriales grecques et chypriotes - pour ne
citer que ceux-là.
Quant
à la Russie, elle avance «gentiment» mais sûrement ses pions dans la région
suite au retrait des Américains. Concernant l’Arménie, elle joue au chat et à
la souris avec les uns et les autres dans le différend Arménie-Azerbaïdjan sur
le Haut-Karabakh. La seule chose qui soit à peu près sûre - bien qu’en
politique rien ne soit définitivement acquis, Moscou ne permettra pas que la
Turquie attaque l’Arménie.
Avant
de clore provisoirement ce chapitre, on notera au passage que ce n’est pas l’Arménie
qui a obligé l’empire ottoman vaincu à signer le traité de Sèvres. Pas plus que
ce n’est cette même Arménie qui a poussé la Turquie, digne successeur de
l’empire ottoman, à signer les Protocoles d’accords de Zurich en octobre 2009(5), pour le rétablissement de
relations diplomatiques et l'ouverture des frontières en vue de normaliser
leurs relations. Coutumière du fait, là aussi, le parlement turc a refusé de
ratifier les accords fraichement signés.
(1) A la conférence de Londres, un accord est signé entre
Aristide Briand et Békir Sami bey. Les kémalistes récupèrent la Cilicie.
(2)
L’accord Franklin-Bouillon (ou accords d’Ankara) stipule
que les kémalistes peuvent récupérer les troupes immobilisées dans le Taurus pour
les envoyer sur front occidental. Avec l’arrivée des Turcs en Cilicie, plus de
100.000 Arméniens se réfugient en Syrie, en Égypte, en Grèce et à Chypre.
La dernière «magouille» de la France dans ce domaine, a
consisté à céder en Juillet 1939 à la Turquie le Golfe d’Alexandrette (Hatay) qui
appartenait à la Syrie. Officieusement pour éviter que la Turquie ne bascule
dans les bras de l’Allemagne. D’où un nouvel exode des Arméniens de la région.
(3)
Au traité de Moscou, Mustafa Kemal obtient du
gouvernement bolchevique les régions arméniennes qui devaient revenir à la Russie
en vertu des accords passés pendant la guerre et dénoncés par Moscou. La
république arménienne cède environ la moitié de ses terres caucasiennes - Kars
et Ardahan, à la Turquie. Le Nakhitchevan passe du protectorat de la Turquie à
celui de l’Azerbaïdjan.
(4)
En pratique le traité de Kars reprend les décisions de
l'accord de Moscou. L'Arménie soviétique ne reconnait plus le traité de Sèvres
de 1920. L'article 4 définit la frontière entre la Turquie et les trois républiques
transcaucasiennes. Selon l'article 5, les gouvernements de la Turquie, de
l'Azerbaïdjan et de l'Arménie acceptent la formation de la république autonome
du Nakhitchevan, placée sous la protection de l'Azerbaïdjan. Dans la foulée, la
Turquie négocie avec l’Iran un échange territorial de quelques km², pour lui
permettre de créer un couloir vers le Nakhitchevan, histoire d’avoir une
continuité des peuples turcs (panturquisme).
(5)
Protocoles d’accords signés le 10 octobre 2009 à
Zurich, entre Edouard Nalbandian pour l’Arménie et Ahmed Davutoğlu pour la
Turquie en présence de la secrétaire d'Etat américaine - Hillary Clinton, des
ministres des Affaires étrangères, russe - Sergueï Lavrov, français - Bernard
Kouchner, suisse - Micheline Calmy-Rey, ainsi que le chef de la diplomatie
européenne - Javier Solana.
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Arménie
«Le Traité de Sèvres était vraiment un traité
de paix et, dans cette perspective, il aurait pu résoudre radicalement l'un des
problèmes les plus complexes de notre région, la question arménienne.
Avant le traité de Sèvres, la première
conférence a eu lieu à Londres entre février et avril 1920, lorsqu'une décision
politique a été prise pour créer un État arménien unique et unifié.
En vertu du Traité de paix de Sèvres, la
Turquie reconnaissait l'Arménie comme un pays libre et indépendant.
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Grèce
«La Grèce attend de l'OTAN qu'elle joue son
rôle dans les actions de la Turquie en Méditerranée orientale et en mer Égée. Le
comportement précaire de la Turquie au sein de l'alliance soulève également des
problèmes de sécurité,» a déclaré le
Premier ministre grec Kyriakos
Mitsotakis.
Le Premier ministre a soulevé cette
question avec le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg.
«L'achat du système S-400 est une
préoccupation pour nous tous, y compris pour les États-Unis, car il met en
danger le chasseur F-35, qui fait partie intégrante de l'OTAN.
Les États-Unis doivent être alarmés par les
actions d'Ankara en Méditerranée orientale ainsi que par son implication en
Libye. La visite à Washington en décembre dernier lui a donné le sentiment
qu'il existe une entente bipartisane selon laquelle les relations avec la
Turquie ne sont pas les mêmes que il y a 3-4 ans.
Les déclarations du département d'État
américain soutiennent également généralement pleinement la position de la Grèce,
à quelques exceptions près. Lorsque les deux parties appellent à la retenue,
c'est fondamentalement injuste du point de vue grec, car ils ne s'engagent dans
aucune activité provocatrice.
L’UE comprend beaucoup mieux que le rôle de
la Turquie dans notre partie du monde n'est pas très constructif. Nous avons
clairement indiqué aux partenaires européens que si la Turquie continue cette
activité, il y aura des conséquences et des sanctions,» a souligné le ministre.
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Turquie
Communiqué
de presse du ministère turc des Affaires étrangères :
«Le Traité de Sèvres, qui visait à démanteler
notre patrie et à mettre fin à notre indépendance et à notre souveraineté au
lendemain de la Première guerre mondiale, a été un exemple qui a mis en avant
les plans honteux d'invasion et de destruction.
L'honorable nation turque a réduit Sèvres en
cendres par sa guerre de libération héroïque, suivie par le Traité de paix de
Lausanne du 24 juillet 1923. Il n'est pas surprenant de voir que
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Extrait de Radiolour, de PanArmenian, de News.am, et de Hurriyet