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Commentaires
et Traductions de Gérard Merdjanian
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Commentaires
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« Froid ? Moi ? Jamais », disait une certaine publicité à propos d’un sous-vêtement. On pourrait appliquer la même logique au dictateur azerbaidjanais qui, après avoir attaqué le Haut-Karabakh à l’autonome 2020 faisant plus de 5.000 morts et des milliers de blessés, occupé 145 km² du territoire arménien, instauré un blocus intégral pendant neuf mois avant de chasser les 120.000 habitants de l’enclave arménienne, se permet de déclarer en substance : « Agresseur ? Moi ? Jamais » ; sous-entendu « Je ne fais que reprendre de force ce qui m’appartient ».
Et le premier ministre
arménien de déclarer devant le parlement européen : « Nous sommes prêts à signer un traité
de paix avec l’Azerbaïdjan d’ici la fin de l’année. » Pas rancunier pour un sou.
Les
forces russes de maintien de la paix ne maintenant plus grand-chose, pourquoi le
dictateur se priverait-il de continuer à narguer les Occidentaux - Etats-Unis
et l’Union européenne en tête, sachant très bien qu’ils ne décideront rien
contre lui. Surtout pas d’une quelconque action au Haut-Karabakh, ils se
contenteront essentiellement de blablater, seul ou à plusieurs, sur le pourquoi
du comment en tirant des plans sur la comète. Pire, le potentat se permet même de
participer à des rencontres tri, quadri, quinque latérales où - sachant que les
promesses ne sont pas contraignantes pour celui qui les fait, mais pour ceux
qui les reçoivent -, il s’engage malicieusement devant ses interlocuteurs à
faire telle ou telle chose.
On
remarquera au passage que si les législateurs occidentaux votent des textes,
voire des résolutions, critiquant durement le comportement de l’Azerbaïdjan en
proposant des actes concrets, leur dirigeants - c'est-à-dire l’exécutif -, n’en
tiennent nullement compte et continuent de caresser Ilham Aliev dans le sens du
poil. La realpolitik basée sur le business.
Quand
l’autocrate azéri a-t-il respecté sa signature, et notamment celle du 9
novembre 2020 avec Vladimir Poutine et Nigol Pachinian, celle qui mettait
fin à la guerre des 44 jours ? Par contre, il faut lui reconnaître une
qualité : Il dit ce qu’il va faire (de l’Arménie et des Arméniens) et fait
ce qu’il a dit, pas entièrement d’ailleurs.
Partant
de cet objectif affiché, Erevan doit s’attendre à une nouvelle agression
d’ampleur dans le Syunik (Sud de l’Arménie) permettant à Bakou de relier
l’Azerbaïdjan oriental à sa république autonome, le Nakhitchevan, et par là, à
la Turquie par un mince couloir de 9 km. Le matériel militaire est déjà en
place pour prendre en tenaille les 35 km du Syunik qui manquent pour réaliser
la continuité turcique de la méditerranée à l’Asie centrale. Le rêve des
Ottomans depuis la perte de leur empire.
Hélas,
le rêve risque fort de devenir réalité. Rappelez-vous.
Il
y a eu un exercice militaire turco-azerbaidjanais en août 2020, c'est-à-dire un
mois avant l’agression massive contre le Haut-Karabakh durant 44 jours. Un
autre en avril 2021. Depuis lundi 23 octobre de nouveaux exercices militaires
tactiques se sont déroulés en Azerbaïdjan, dans le Haut-Karabagh récemment conquis,
et au Nakhitchevan. Rassemblant 3.000 hommes des deux pays, des dizaines de
véhicules blindés, de l’artillerie et une vingtaine d’aéronefs. Les soldats se
sont exercés, entre autres, à la construction de pontons et à des
parachutages en territoire ennemi. (sic)
Contrairement
à ce qui vient de se passer au Haut-Karabakh - où la communauté internationale
a mis en avant exclusivement le droit humanitaire et le comportement d’un Etat
vis-à-vis de sa minorité autochtone, faisant fi du droit des peuples à disposer
d’eux-mêmes -, l’invasion partielle de l’Arménie, créera des réactions
violentes d’au moins deux pays directement concernés : la Russie et
l’Iran, et une réaction favorable, celle de la Turquie.
La
Russie, en premier lieu, car elle perdrait en plus d’un pied-à-terre au Caucase,
une alliée militaire, même si les rapports Erevan-Moscou actuels sont plutôt
nuageux. Poutine ne tient pas, non plus, à ce que le tandem Erdoğan-Aliev lui
coupe l’axe Nord-sud vers l’Iran et voir l’influence de la Turquie augmenter
encore plus dans la région. Les bonnes relations avec le tandem ne sont
qu’apparentes. Dans le contexte actuel de guerre avec l’Ukraine, elles sont
strictement basées sur des nécessités économiques.
L’Iran
ne tient pas non plus à la suppression de l’axe Nord-sud, qui lui permet de
maintenir son lien privilégié avec Moscou. Le comportement de l’Azerbaïdjan ne
rassure pas Téhéran malgré les amabilités d’Aliev. Bakou entretient des liens
étroits avec Tel-Aviv, un « gentil » fournisseur d’armement. En
échange, le territoire azerbaidjanais sert de « points
d’observation » vers l’Iran. Pour resserrer ces liens, l’Azerbaïdjan fournit
à Israël en gaz et en pétrole, par Turquie interposée.
Toujours
est-il que la Russie n’a pas grand besoin de l’Arménie, mais on ne sait jamais.
Ce désintérêt envers ce soi-disant allié s’est renforcé en 2018 avec l’arrivée
au pouvoir du dirigeant actuel Nigol Pachinian. Le refus de l’Arménie pour une
résolution du conflit du Haut-Karabakh par étape – restitution de cinq
districts dans un premier temps puis négociation sur les deux derniers districts
mitoyens avec l’Arménie, dans une seconde étape – n’a pas eu l’agrément du
gouvernement arménien. Le mécontentement de Poutine s’est traduit d’abord par
un laisser-faire lors de la guerre de 44 jours de l’automne 2020 ; par la
non-intervention de l’OTSC à l’automne 2021 lorsque l’Azerbaïdjan s’est
attaqué au territoire de l’Arménie ; par la non-intervention des casques bleus
russes lors du blocus du Haut-Karabakh en décembre 2022 ; suivi par sa non-intervention
au poste-frontière au pont de Kabala en mai 2023 ; et enfin par la
neutralité bienveillante des mêmes soldats de la paix russes lors de l’assaut
final de Bakou sur le Haut-Karabakh le 19 septembre 2023.
Ni
les Etats-Unis, ni l’Union européenne, ne mettront le doigt dans l’engrenage
caucasien, tout au plus verseront-ils un peu plus d’aides financières, voire
d’armements (du moins pour la France). Washington n’a pas du tout l’intention
de se couper du défenseur Sud-est de l’OTAN, à savoir le sultan néo-ottoman et
son valet azéri, pas plus que l’Union européenne, de son pourvoyeur énergétique
caucasien.
Tout
le monde pousse Nigol Pachinian à signer un traité de paix avec Ilham Aliev ;
Et tant pis pour les zones d’ombre encore non réglées et surtout pour le
devenir des autochtones plurimillénaires.
On
voudrait définitivement asservir une nation au tandem turco-azerbaidjanais
qu’on ne s’y prendrait pas autrement.
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Traduction
Extrait de Radiolour, de PanArmenian, de News.am, de APA, du Parlement européen, de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, ainsi que de l’Union européenne.
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Arménie
Nigol Pachinian a reçu la Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, Dunja Mijatović.
Les interlocuteurs ont discuté de la situation humanitaire créée par le déplacement forcé de plus de 100.000 Arméniens du Haut-Karabakh à la suite de la politique de nettoyage ethnique de l’Azerbaïdjan et des nouvelles mesures d’assistance de la communauté internationale.
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Union
européenne
Le Premier ministre arménien Nigol Pachinian a pris la parole devant le Parlement européen.
Larges extraits du discours :
« ()… Après la signature de la déclaration tripartite de cessez-le-feu à la fin de la guerre de 44 jours, lorsque les institutions de l’État d’Arménie sont devenues la cible d’attaques de groupes extrémistes, lorsque la société était divisée et furieuse, les institutions démocratiquement formées sont restées fermes dans leurs positions de protection de l’État, tout en ne violant aucun principe de la démocratie. La liberté d’expression et de réunion n’a pas été restreinte en Arménie, les cas d’usage disproportionné de la force n’ont pas été enregistrés et l’état de droit n’a pas été déprécié.
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Conseil
de l’Europe
La Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe, Marija Pejčinović Burić, a rencontré le Premier ministre arménien Nigol Pachinian. La réunion s’est concentrée sur l’évolution de la situation dans la région et sur la contribution du Conseil de l’Europe, notamment à la lumière de la récente visite en Arménie du Représentant spécial de la Secrétaire Générale pour les migrations et les réfugiés.
La Secrétaire Générale a réitéré que tous ceux qui vivent dans l’espace géographique du Conseil de l’Europe ont droit à la pleine jouissance de tous les droits de l’homme et libertés tels qu’ils sont consacrés par la Convention européenne des droits de l’homme.
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France
« Je serai en contact la semaine prochaine avec le ministre arménien de la Défense, Souren Papikian, pour finaliser les mesures opérationnelles et concrètes. La France se tient aux côtés de l’Arménie », a déclaré le ministre Sébastien Lecornu lors des discussions sur le budget de la défense 2024 au Sénat.
S’exprimant aux côtés du ministre arménien des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, au début du mois, la ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, avait déclaré « Paris a accepté de signer des contrats de livraison d’équipements militaires à l’Arménie. La France a donné son accord pour la conclusion de futurs contrats avec l’Arménie qui permettront la livraison d’équipements militaires à l’Arménie afin qu’elle puisse assurer sa défense. » Elle avait refusé de fournir des détails.
« Je ne peux pas donner beaucoup de détails.
Si je dois aller un peu plus loin, sachez qu’il y a des choses qui ont déjà été
convenues entre l’Arménie et la France et qui sont en cours. »
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Iran
À l’invitation de S.E. M. Hossein Amir-Abdollahian, Ministre des Affaires étrangères de la République islamique d’Iran et en présence de S.E. M. Ararat Mirzoyan, Ministre des Affaires étrangères de la République d’Arménie, S.E. M. Jeyhun Bayramov, Ministre des affaires étrangères de la République d’Azerbaïdjan, S.E. M. Sergey Lavrov, Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie et S.E. M. Hakan Fidan, le ministre des Affaires étrangères de la République de Turquie, la deuxième réunion de la plateforme régionale « 3+3 » s’est tenue le 23 octobre 2023 à Téhéran.
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Turquie-Azerbaïdjan
« L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) a commis une erreur historique en adoptant la recommandation et la résolution concernant la Turquie le 12 octobre 2023. Avec cette initiative, l’APCE instrumentalise les processus judiciaires à des fins politiques et tente de fermer les canaux du dialogue. Cela va à l’encontre des valeurs démocratiques qui constituent la raison d’être de l’APCE », a déclaré le ministère turc des Affaires étrangères dans un communiqué.
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Extrait de Radiolour, de PanArmenian, de News.am, de APA, du Parlement européen, de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, ainsi que de l’Union européenne.