Accord de paix Arménie-Azerbaïdjan (suite et non fin)


 

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Commentaires et Traductions de Gérard Merdjanian

 

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Commentaires

 

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La communauté internationale, ou presque, a applaudi la fin des négociations par les intéressés de l’accord de paix entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan et, qu’il ne restait plus qu’à le finaliser. Oui, mais…

 

Rappelons que le projet d'accord de paix comprend 17 articles, dont 15 avaient déjà fait l'objet d'un accord. Les deux points non résolus portaient sur la renonciation aux revendications internationales mutuelles et sur l'abstention de déployer des représentants d'autres pays le long de la frontière entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. C’est chose faite, l’Arménie a accepté.

 

Comme on pouvait s’y attendre, Bakou a posé de nouvelles conditions préalables : 1- L’Arménie doit demander la dissolution du Groupe de Minsk de l’OSCE ; 2- et surtout, elle doit changer sa Constitution en supprimant toute allusion au ‘Karabakh’. Suite à quoi, il a déclaré qu'il était trop tôt pour discuter des dates de réunion en vue d’une signature.

 

En terme familier, cela s’appelle du « foutage de gueule ».

 

Ilham Aliev, à l’instar de Vladimir Poutine, aime à faire durer le plaisir de sa signature au bas d’un accord, qui comme la ligne d’horizon, plus on s’en approche, plus elle s'éloigne. Le dictateur n’a pas terminé son travail en Arménie.

 

Tous ceux qui ont salué les déclarations conjointes de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan d’une paix future, n’ont pas fait de nouvelles déclarations suite aux deux rajouts de Bakou. Une fois cette étape franchie — au mieux en 2026 pour la nouvelle Constitution, le potentat présentera la suite des « réjouissances » à savoir : En premier lieu la libération du ‘couloir du Zanguézour’ de toute surveillance arménienne, suivi un peu plus tard du retour dans le  ‘Zanguézour occidentale’ — entendez par là les ¾ de l’Arménie, de dizaines de milliers d’Azéris ayant fui les combats lors de la première guerre du Karabakh.

 

On notera une différence fondamentale dans l’approche des problèmes avec ses voisins turco-azéris. Ilham Aliev fait toujours référence à l’histoire, même révisée, pour appuyer ses revendications, alors que Nigol Pachinian se focalise exclusivement sur l’Arménie « réelle » postsoviétique, faisant fi de tout le passé historique. De même avec la Turquie, il évite de parler de génocide pour évoquer les événements tragiques de 1915, se contentant de parler de « medz yéghérne ». Pleutre comme il est, dans ses échanges avec Ankara, il devrait dire « Mont Ağrı Dağı » en lieu et place de « Mont Ararat », peut-être qu’Erdoğan lui lancera un os.


Nombre d’observateurs avertis, qu’ils soient nationaux ou diasporiques, ne partagent pas l’optimisme béat de Nigol Pachinian. Pour eux, « une hirondelle ne fait pas le printemps ».

 

Depuis les signatures, en présence de Moscou, des deux cessez-le-feu entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, qui mettaient fin : 1- à la première guerre du Karabakh en mai 1994 ; 2- à la seconde guerre du Karabakh en novembre 2020 ; tout le monde a pu constater comment Bakou se fichait pas mal de sa signature et de ses engagements.

 

Pourquoi s’arrêter en si bon chemin face au ventre mou de Pachinian ?

 

Par conséquent, Ilham Aliev tient absolument voir inscrits dans l’accord de paix, les points suivants :

 

-      Renoncer à présenter par l’Arménie des revendications devant des organisations internationales, lui permet d’éviter des réflexions désagréables, voire des jugements défavorables, et passer aux yeux de l’Occident pour un pays respectueux des normes et du droit international ;

-      Ne plus avoir des Observateurs étrangers à sa frontière avec l’Arménie, lui permet de lancer des petites ‘incartades’ et le cas échéant, d’installer des équipements militaires, pas forcément défensifs. Qui va aller vérifier ? ;

-      Forcer l’Arménie à demander la suppression du Groupe de Minsk de l’OSCE, lui permet de supprimer toute revendication de la part des Karabakhis de leur droit et un retour sur leurs terres, telles qu’il ressort des dernières propositions – toujours valables, du Groupe de Minsk. Le ‘fin’ politicien arménien a dit tout de suite ‘oui’ ;

-      Obliger l’Arménie à supprimer toute référence ou allusion au Haut-Karabakh, lui permet de se prémunir contre toute action d’Erevan contre lui, se basant sur du factuel ou sur l’histoire ;

-      La libéralisation totale du ‘couloir du Zanguézour’ de toute contrainte arménienne, lui permet d’avoir une liaison permanente avec le Nakhitchevan et donc avec la Turquie. Cela permet de faire transiter tout ce que l’on veut, comme on veut. Cerise sur gâteau, on coupe l’Arménie de l’Iran et on maitrise ainsi trois des quatre frontières de l’Arménie. C’est d’ailleurs ce qu’a déclaré Ankara tout en félicitant la future signature de l’accord de paix ;

-      Le retour des Azerbaïdjanais en Arménie permettra de noyauter et de déstabiliser le pays par le tandem turco-azéri.

 

Indépendamment du fait que l’on ne connaisse pas en détail les quinze autres points de l’accord de paix, un grand nombre d’interrogations restent sans réponse.

 

-      Quid des 27 prisonniers et otages détenus dans les geôles de Bakou ? Seront-ils libérés ou croupiront-ils en prison ?

-      Quid des Arméniens du Haut-Karabakh chassés de leur foyer en novembre 2023 ?

-      Quid des 243 km² du territoire de l’Arménie occupés par l’armée azerbaïdjanaise depuis décembre 2020 ? Seront-ils restitués à l’Arménie ?

-      À ce jour, seuls 12 km sur les 566 km que compte la frontière arméno-azerbaïdjanaise ont été délimités. En restera-t-il  toujours 554 à la fin de la délimitation ou moins ?

-      Peut-on signer un accord de paix alors que l’on ne connait pas la superficie exacte sur laquelle porte l’accord ? À ce jour, Ilham Aliev n’a jamais reconnu que la superficie de l’Arménie est de 29.743 km².

-      Qui garantira que l’accord sera appliqué ?

-      Qui s’assurera qu’Ilham Aliev, passant outre à son engagement, n’agressera pas de nouveau l’Arménie ?

 

Aveuglé qu’il est par son désir absolu de signer l’accord de paix au plus vite, Nigol Pachinian ne veut pas voir la quantité de zones d’ombres de l’accord.

 

Cela ressemble quelque part aux relations Trump-Poutine, toute proportion gardée. Le premier veut faire signer rapidement une trêve dans la guerre russo-ukrainienne, faisant de nombreuses concessions ; Le second, met des conditions difficiles à satisfaire, afin de gagner du temps dans le but de « casser » l’Ukraine une bonne fois pour toutes. Une différence énorme toutefois, l’Arménie n’est soutenue par personne.

 

 

 

 

 

 

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Traduction

 

Extrait de Radiolour, de PanArmenian, de News.am, et de APA


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Arménie

 

Le ministère arménien des Affaires étrangères a déclaré avoir accepté les propositions de l'Azerbaïdjan concernant les deux points non résolus, et l'accord de paix est désormais prêt à être signé. Le ministère a indiqué que l'Arménie était prête à entamer des consultations sur la date et le lieu de la signature.

 

Le projet d'accord de paix comprend 17 articles, dont 15 avaient déjà été approuvés. Les points non résolus étaient la renonciation mutuelle aux revendications internationales et le non-déploiement de représentants étrangers le long de la frontière entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan.

Suite


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Union européenne – France

 

Le commissaire européen à l'énergie et au logement, Dan Jørgensen, lors du débat au Parlement européen sur « La détention illégale et les procès truqués d'otages arméniens, y compris de hauts représentants politiques du Haut-Karabakh, par l'Azerbaïdjan », a déclaré :

 

« La Commission européenne suit les procès des 16 accusés arméniens du Karabakh qui se déroulent devant le tribunal militaire de Bakou depuis le 17 janvier dernier. Nous sommes conscients que des organisations de défense des droits humains ont exprimé des inquiétudes quant à l'équité des procès et au traitement réservé aux accusés. 

Suite

 

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Turquie-Azerbaïdjan

 

« Il est encore trop tôt pour discuter du lieu de signature d’un accord de paix entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.

 

La partie azerbaïdjanaise attend actuellement les amendements pertinents à la Constitution de l'Arménie pour supprimer les revendications sur nos territoires souverains qui existent depuis les années 1990 et la dissolution du Groupe de Minsk. Les deux États peuvent faire appel à l'OSCE concernant cette dernière question. La partie azerbaïdjanaise propose cette solution depuis un certain temps, considérant que le conflit a été résolu.  

Suite

 

 

 

 

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Extrait de Radiolour, de PanArmenian, de News.am, et de APA